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Les bénévoles de l'épicerie
Contenu national
Thème
Alimentation
Commune
Gardanne

À Gardanne, une épicerie différente

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À Gardanne, dans les Bouches-du-Rhône, Le Colibri, créé par le Secours Catholique, est une « épicerie différente » ouverte à tous et tenue par des bénévoles. Dans ses rayonnages, des produits de qualité. Les clients sont indifféremment des ménages en précarité, qui bénéficient de prix réduits, et des acheteurs pleins tarifs dits « solidaires ». Reportage.

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« Y’a pas tout, mais c’est bien », commente Salihe tandis qu’elle passe en caisse. Dans son panier, entre autres produits choisis, noisettes salées, yaourts, feta. Le tout pour environ 6 euros au lieu de 13. En raison de sa situation financière, cette mère de trois enfants bénéficie de tarifs préférentiels. « Je trouve des produits pas chers, comme le lait pour mes enfants, ou bien la farine », apprécie-t-elle. « Mardi, j’ai acheté quelques légumes, mais les enfants n’aiment pas tout ».

Les légumes colorés, parmi lesquels de petits choux-fleurs violets cultivés par une agricultrice de la commune, sont disposés avec soin au centre de l’épicerie. Le Colibri a ouvert ses portes à Gardanne à l’automne 2023, à l’initiative du Secours Catholique dans le cadre de son programme national Ensemble bien vivre bien manger. Une vingtaine de bénévoles font vivre la boutique. Ce matin-là, Catherine, Pascale, Sylviane, Antoine et Mélanie se relaient à la caisse, au réassort des rayons, ou encore à l’accueil chaleureux des clients. 

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On est à l’affût de petits producteurs

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« Regardez nos beaux légumes ! » s’exclame Pascale, à l’adresse de Shéhérazade, une Syrienne qui élève seule ses trois enfants. « Lesquels aimez-vous cuisiner ? »  L’un des objectifs de l'épicerie est de favoriser l’accès de chacun, quels que soient ses moyens, à une alimentation de qualité. Ainsi, le Colibri propose beaucoup de produits frais, locaux ou bio, un rayon “vrac” ou encore des lessives et savons artisanaux. « On est à l’affût de petits producteurs pour proposer des choses sympas », explique Pascale, qui participe au choix de l’approvisionnement. Des produits qu’apprécie Ruby, bonne cuisinière et cliente “solidaire” : « Je paie plein pot » lance-t-elle en riant, avec une pointe d’accent américain. « Ici, c’est un projet courageux, humain et solidaire ».

Sabrina, elle, pousse la porte du Colibri pour la première fois. En situation d’invalidité, la jeune femme a du mal à remplir son frigo. Heureusement que sa mère l’aide. Après échange avec les bénévoles, c’est décidé : elle va constituer un dossier pour bénéficier des tarifs réduits, le temps de se sortir de cette mauvaise passe. « On ne va pas régler tous les problèmes alimentaires du monde, observe Catherine, bénévole, mais on fait notre part ». Telle une nuée de colibris.

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Antoine, bénévole
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Sur le vélo à smoothies, attraction utilisée par l’équipe du Colibri pour faire parler d’elle, Antoine, travailleur en Esat pendant de nombreuses années, porte désormais lui aussi le tablier floqué. « Ça me fait une nouvelle expérience, témoigne l’homme aux airs et à l’accent pagnolesques. Il y a une bonne ambiance. Et maintenant, je suis intégré en plein. »
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Catherine, bénévole
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« Tout me plaît dans ce projet ! », se réjouit Catherine, ex informaticienne, qui « s’éclate avec le logiciel de caisse ». « Et puis ce truc de jouer à l’épicière, et surtout, de voir la joie des personnes qui font le plein de bons produits pour une somme modeste, c’est génial ! ». Catherine fait partie des Citoyens solidaires, un dispositif de la commune qui rassemble les habitants volontaires pour des missions bénévoles. Elle a choisi de s’impliquer au Colibri. « Je voulais rentrer dans un projet bien amont, et c’est ce que j’ai fait. Et dès qu’on a eu le local, ça a vraiment démarré. » L’équipe n’a pas ménagé ses efforts pour faire éclore le projet, battant le pavé devant les supermarchés et sur les marchés pour sensibiliser les habitants.. « C’est un projet qui prend pas mal d’énergie mais qui me tient à cœur », souligne Pascale, engagée depuis 30 ans au Secours Catholique.
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Geneviève, cliente solidaire
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Geneviève, cliente solidaire très investie dans la paroisse, s’occupe d’approvisionner Le Colibri en gourmandises du sud-ouest, notamment en délicieux pruneaux d’Agen. « C’est un biais intéressant pour aider les pauvres, explique-t-elle. Je rends un double service : je fais découvrir aux gens de bons produits, et j’aide de petits producteurs à faire connaître leur travail ».
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L’approvisionnement de l’épicerie est décidé par les membres du comité de pilotage de l’épicerie, dont font partie Pascale et Catherine. Parmi les fournisseurs : une centrale d'achat de la région lyonnaise, le réseau d’insertion par le maraîchage Les Jardins de Cocagne ainsi qu’une agricultrice de la commune pour les fruits et légumes, la coopérative Biocoop pour le “vrac”. Vin et bière sont achetés en direct. Des achats complémentaires sont également effectués par les bénévoles dans les supermarchés du secteur. Le modèle économique de l’épicerie reste à stabiliser. « C’est un projet qui attire des bénévoles et des soutiens financiers », se félicite néanmoins Sylvain Millereux.
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Ruby, cliente solidaire
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Professeure d’anglais à la retraite, Ruby est venue acheter des œufs, quelques blettes et de l’ail pour son bouillon de légumes du soir. Elle est aussi une cliente “solidaire” du Colibri. C’est une passionnée de cuisine, qui attache une grande importance à la qualité des produits, achetant par exemple sa viande directement à un producteur dans le Tarn. Elle déplore que la « majorité des gens n’aient pas d’autre choix que d’acheter en supermarché ».
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Pino, client solidaire
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Client “solidaire” et sympathisant du projet depuis ses débuts, Pino est aussi professeur de cuisine. Il est venu tester la lessive et le savon proposés en rayon, en attendant de pouvoir animer un atelier cuisine. C’est une autre dimension participative de l’épicerie amenée à se déployer dans les prochains mois : la tenue d’ateliers collectifs, pour créer du lien et redonner confiance en soi aux personnes en difficulté.
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Mélanie, bénévole
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Mélanie, 34 ans, mère d’une fillette de 2 ans et sans activité depuis quatre ans, s’est présentée le matin-même à l’épicerie pour proposer de son temps, lassée de « rester à la maison à faire la cuisine et le ménage ». La jeune femme salue un principe sur lequel est basé l’épicerie : le choix. « Ici, contrairement aux lieux de distribution de colis, les gens peuvent choisir d’acheter exactement ce qu’il leur manque dans leurs placards, pas ce qu’on veut bien leur donner, relève-t-elle. Et en plus, ce sont des produits de qualité ». « Comme les gens paient, ils n’ont pas honte de franchir la porte », ajoute Sylviane, bénévole elle aussi.
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Pour bénéficier de tarifs de 30 à 50% inférieurs aux prix affichés, les clients en difficulté doivent être orientés vers l’épicerie par un travailleur social. Le tarif préférentiel leur est ensuite attribué pour une durée limitée (6 à 9 mois, renouvelable une fois), sous un plafond mensuel déterminé en fonction de la composition du foyer (36 euros pour une personne seule, 66 euros pour une famille de trois personnes). « On demande aux ménages de motiver leur demande par un projet qu’ils ont besoin de financer : que ce soit une dette qui les met dans le rouge ou un projet de partir quelques jours en vacances… Avec la non-gratuité, c’est une manière de responsabiliser les personnes, et de mieux les accompagner dans la résolution de leurs difficultés », explique l’animateur salarié Sylvain Millereux, qui suit le projet.
Auteur et crédits
Clarisse Briot, journaliste et Anthony Micallef, photographe