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Dans le cadre du programme “De la fourche à l’assiette”, des agriculteurs et agricultrices ouvrent leur porte aux familles qui bénéficient de paniers distribués par le Secours Catholique.
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Actualité nationale
Thème
Alimentation
Commune
Bouches-du-Rhône

Agriculture et alimentation : un nouveau modéle à inventer

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Alors que s’est ouvert le 26 février, à Paris, le salon de l’agriculture, six associations et mouvements liés au monde rural et à la précarité, dont le Secours Catholique, réfléchissent ensemble à un modèle agro-alimentaire plus vertueux.

Penser un autre système agro-alimentaire. Un modèle qui permettrait à tous les ménages, quels que soient leur situation financière et l’endroit où ils vivent, de se nourrir avec des produits choisis et de bonne qualité, tout en garantissant aux agriculteurs un niveau de vie convenable.

C’est le défi que s’est lancé la vingtaine de participants au « Carrefour des savoirs sur l’accès digne à l’alimentation », qui se tient les 24 et 25 février, près de Soissons, dans l'Aisne, à la veille de l’ouverture du Salon de l’agriculture, à Paris.

Organisé par le Secours Catholique et l’association Aequitaz, ce groupe de réflexion réunit des membres d’associations et de mouvements liés au monde rural et à la précarité : ATD-Quart Monde, le réseau des AccorderiesChrétiens en monde rural et Solidarité paysans.

Si les problématiques de précarité alimentaire et plus précisément d’accès digne à une alimentation saine et durable, ne sont pas nouvelles, elles ont été exacerbées par la récente crise sanitaire. Au printemps 2020, des familles se sont retrouvées subitement dans le rouge, du simple fait de la fermeture des cantines scolaires, ou de l’augmentation du prix des produits de base, particulièrement celui des fruits et légumes.

UNE PRÉCARITÉ ALIMENTAIRE STRUCTURELLE

Cette manifestation brutale et massive de la difficulté qu'ont de nombreux ménages en France à se nourrir correctement, a incité plusieurs acteurs, dont le Secours Catholique, à mener un travail d’enquête et d’analyse sur le sujet.

« Cela nous a permis de percevoir, derrière les demandes individuelles d’aide, une précarité alimentaire structurelle, souvent liée au revenu, mais aussi à l’endroit où vivent les personnes  : que peuvent-elles, par exemple, acheter autour de chez elles ? », explique Marie Drique, chargée de projet “Accès digne à l’alimentation” au Secours Catholique.
 

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Il y a besoin d’une réponse systémique plutôt que de solutions palliatives.

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Marie Drique,du Secours Catholique.
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Lors de l’enquête menée auprès des ménages auxquels il a attribué des chèques-services pendant la durée du confinement, le Secours Catholique a aussi pu mesurer l’intérêt que les personnes portent aux effets de l’alimentation sur leur santé : 83 % d’entre-elles se disaient préoccupées, avec le sentiment de ne pas avoir de prise sur le sujet. Ces observations ont confirmé « le besoin d’une réponse systémique plutôt que de solutions palliatives », poursuit Marie Drique.

Cela induit une approche globale pour comprendre « comment la manière dont on s'organise pour se nourrir, les modes de vie et des logiques économiques peuvent générer des situations de précarité aux deux bouts de la chaine alimentaire, côté consommateur d'une part, côté producteur d'autre part », précise Marie Drique.

PRODUCTEUR DE MATIÈRE PREMIÈRE

Producteur laitier à la retraite, et administrateur de l’association Solidarité paysans, qui aide les agriculteurs en difficultés, Didier Bouguillon s’inquiète de voir aujourd’hui beaucoup de paysans « qui ne sont pas capables de se nourrir eux-mêmes ». Ce n’est pas qu’ils n’en ont pas la possibilité, dit-il - « avoir un bout de terre où cultiver son potager, élever quelques volailles et un cochon, ce n’est pas compliqué »-, mais « ils n’y pensent même pas. Ils font leurs courses au supermarché comme tout le monde ».

Pour lui, cette réalité est symptomatique d’un système agro-alimentaire qui a déconnecté l’agriculture de sa fonction première, celle de nourrir. Selon lui, le paysan est devenu un simple producteur de matière première, rouage d’un processus industriel sur lequel il n’a pas la main. Didier Bouguillon dénonce un système qui « a vidé de sons sens l’activité de production », a appauvri de nombreux paysans et peut parfois aboutir à des situations ubuesques où des agriculteurs en précarité reçoivent, lors de distributions d’aide alimentaire, du lait donné par des coopératives laitières, « qu’ils ont peut-être produit eux-mêmes ».

Citation

Le système agro-industriel a vidé de son sens l'activité de prodution.

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Didier Bouguillon, de Solidarité paysans
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Pour Didier Bouguillon, « il faut arriver à ce que le paysan retrouve son autonomie, notamment son autonomie décisionnelle, sa capacité d’initiative et de discernement ». La garantie d’une d’une offre alimentaire saine et durable passe par-là, estime-t-il.

« Si on veut avoir une alimentation correcte, il faut que nos agriculteurs puissent vivre dignement de leur métier », le rejoint Patricia Thiéry, animatrice du mouvement Chrétiens dans le monde rural, dans le Pas-de-Calais. Et de souligner notre poids en tant que consommateurs dans l’avènement ou non d’un système alimentaire plus vertueux : « Lorsqu’on achète en supermarché un poulet à 7 euros le kilo, on ne peut imaginer qu’il a été produit localement et dans de bonnes conditions. »

LIBERTÉ DE CHOIX

C’est notamment sur ce point que travaille la vingtaine de participants au « Carrefour des savoirs sur l’accès digne à l’alimentation », en essayant de répondre à la question : quels sont pour vous les facteurs de choix ? « Il y a l’argent, mais aussi la composition du foyer, l’endroit où on vit, le niveau dinformation sur les produits, limpact de la publicité dans nos vies, liste Jérôme Bar, de l’association Aequitaz. On essaye de comprendre linfluence de ces différents facteurs sur nos choix. »

Pas évident, estime le militant associatif, de concurrencer un système agro-industriel qui propose une offre alimentaire peu chère, variée et facile d’accès. « Comment arriver à amener des solutions qui respectent la liberté de choix et les contraintes de tous », interroge Jérôme Bar.

C’est tout l’enjeu de ce Carrefour des savoirs qui, en réunissant consommateurs et producteurs, précaires et non précaires, mise sur la complémentarité des regards.

Auteur et crédits
Benjamin Sèze - Crédits photos : ©Xavier Schwebel / Secours Catholique